Saint-Sauvant se situe dans la vallée du Coran, lieu emblématique de l’histoire de l’homme ; c’est à 2 km du nord du bourg que fut découvert en 1979 le squelette de « Pierrette », Néandertalienne de 35 000 ans.
Saint-Sauvant à l’Antiquité
Le village était traversé par la via Agrippa. A l’ouest, elle empruntait l’actuel « Chemin de Saintes » (à gauche à la sortie du bourg en direction de Saint-Césaire), puis coupait la vallée du Coran pour rejoindre les actuelles rue des Francs-Garçons et rue de l’Etang. A l’est, après avoir coupé et longé la vallée du Pidou, la voie Agrippa était rectiligne à partir de Lorgère et Tartre (actuelle « Chaussée des Romains ») en direction de Cherves-Richemont en Charente.
Cette voie antique majeure date des Romains, au Ier siècle avant J.-C., et correspond à la voie romaine qui reliait Lugdunum, capitale des Gaules (Lyon) à Saintes alors appelée Mediolanum Santonum.
Saint-Sauvant à l’époque médiévale
Une présence moyenâgeuse est attestée entre autre par la découverte de sarcophages de l’époque carolingienne, c’est à dire entre 751 et le Xème siècle. Ils ont été découverts à l’endroit de l’ancien cimetière paroissial, côté sud de l’église.
Puis, le bourg haut s’est développé vers le XIe-XIIe siècle autour de l’église dédiée à saint Sylvain, évêque de Gaza au IIIe siècle et martyr. C’est elle qui a donné, par déformation, son nom au village. Construite au XIIe siècle, elle a été enchâssée par la suite dans un système défensif avec la construction de puissants contreforts et d’une chambre de défense.
Placée en position dominante, l’église contrôle un dédale de rues étroites et en pente ainsi qu’une porte présentant des traces de fortifications postérieures aux Guerres de Religion (1562/1598).
La présence de cette porte et de la tour médiévale sur le plateau qui domine la vallée du Coran, laisse supposer que le bourg a été érigé dès le Moyen Age sous la forme d’un castrum, comprenant une enceinte urbaine et un château. Toutefois, l’état actuel des connaissances ne permet pas d’attester la présence d’un château à Saint-Sauvant. L’église pourrait avoir été englobée dans une modeste enceinte maçonnée dont témoigne encore la porte surmontée de consoles.
Quant à la tour du XIVème siècle qui domine la vallée du Coran, son emplacement paraît difficilement compatible avec le dispositif d’un château fortifié, mais plutôt avec une extension urbaine disparue probablement à la suite des guerres de Cent ans (1337/1453). Cette tour carrée a été utilisée comme prison jusqu’en 1870.
Époque moderne
Sous l’ancien régime, de la fin du XVIème à la Révolution, Saint-Sauvant dépendait administrativement de la Généralité de La Rochelle. La paroisse de Saint-Sauvant, siège d’une baronnie importante, appartenait au Chapitre des chanoines de la cathédrale de Saintes. En 1698, l’intendant Bégon mentionne, dans son mémoire sur la Généralité de la Rochelle, que la terre de Saint-Sauvant donne « 1025 livres de bled et vin en grande quantité ».
La juridiction de la baronnie de Saint-Sauvant s’étendait sur un vaste territoire avec des pouvoirs judiciaires notamment de droits de haute justice et juridiction haute, moyenne et basse et de prison dans la tour. Dans les années 1670, le sieur Jean Côme Duchâtel, licencié en droit, avocat de la Cour, juge sénéchal de la Baronnie de Saint-Sauvant, des Terres de Chérac et de La Chapelle, résidait à l’Etang. Sa famille s’installa par la suite au Domaine de Lorgère jusque dans les années 1860.
Dans les hameaux, nobles et bourgeois possédaient des fiefs, comme les Pichon de la Sablière (Sieur Josué de la Sablière, Ecuyer, Conseiller du Roi, Procureur en l’Election, secrétaire du Roi, avocat au Parlement, fils de Jacques Pichon de Montereau, anobli par Louis XIV en 1700), François Ardouin, Sieur de Bellevue, fils de Daniel Ardouin, conseiller du Roy, substitut en l’élection de Saintes, les Dussault de la Mirande à Senouche (à cette époque, Senouche faisait partie de la paroisse de Saint-Sauvant).
De nombreuses terres étaient organisées en «borderies », exploitées par des bordiers, laboureurs à bras qui payaient une rente annuelle aux propriétaires, nobles, bourgeois et notables.
A partir du XVIIème siècle, les habitations et commerces ont commencé à se développer dans le bas du bourg vers les vallées en suivant les rues, phénomène qui se renforce tout particulièrement au XIXème siècle comme l’indiquent certaines très belles demeures en pierre de taille.
Au début du XVIIIème siècle, les Cordeliers, frères mineurs de Saintes, possédaient une petite borderie à Saint-Sauvant2 . Elle leur avait été donnée par Anne d’Autriche, à la charge d’une messe par jour pour la famille royale. Ils possédaient également six journaux3 de prés à Dompierre.
Pourrait-il s’agir du lieu-dit Les Cordeliers, sur la voie communale qui mène au Pontreau ?
Pendant cette période, moulins à farine et à chanvre se développent dans les vallées et sur les hauteurs. Plusieurs moulins à eau étaient installés le long du Coran, alimentés par des biefs et canaux, produisant la farine pour les boulangers de Saint-Sauvant et alentours :
- Le « Moulin du Bourg » : deux meuniers faisaient tourner ce moulin qui possédait 2 roues ; il a tourné jusqu’en 1943 avec une roue.
- Le Moulin de Chevessac, appelé plus tard l’usine Bénuraud qui s’est arrêté de tourner dans les années 70.
- Le Moulin de Coran : le plus important des trois, ne fonctionne plus depuis 1957.
Ces trois moulins, comme en témoignent les registres paroissiaux, ont appartenu à des familles de meuniers et fariniers qui se sont transmis leurs biens et savoir-faire jusqu’à la fin du XIXème siècle. Ils sont depuis devenus d’agréables maisons d’habitation.
- Les vestiges d’un moulin situé le long du Pidou sur la Place Gilberte Bouquet ont été restaurés par la commune dans les années 2010. L’état de nos connaissances ne nous permet pas de savoir s’il s’agissait d’un moulin à farine ou d’un moulin à chanvre.
Deux moulins à vent tournaient sur la commune : l’un sur les hauteurs de Croix-Echelle, dont les ruines sont visibles depuis le haut du bourg et l’autre, sur les coteaux de La Grange, présent sur le cadastre napoléonien de 1818, et aujourd’hui disparu. Comme pour les moulins à eau, une même famille de meuniers a fait tourner ce moulin pendant de longues années.
Au moins un moulin à drap était en activité à Saint-Sauvant : le moulin de l’étang à la sortie du bourg, en direction de Chérac et Cognac. En 1794, la commune de Saint-Sauvant «remerciait la veuve Seguin de l’Etang d’avoir rétabli le moulin à draps qui traitait le chanvre et qui était resté en ruines pendant 40 ans…». Devenu propriété de la commune par donation en 1946, il a fait l’objet d’une restauration dans les années 1990.
Le chanvre était utilisé pour fabriquer les cordages et le linge de maison : draps, nappes et linge de corps. Les registres paroissiaux, à partir de 1640, attestent de l’activité liée à la transformation du chanvre : on y retrouve filtoupiers (batteurs de chanvre), cordiers, tissiers (tessiers, texiers), tisserands et apprêteurs d’étoffes.
On peut donc imaginer que la culture du chanvre était très présente à Saint-Sauvant.
Carrières
Carriers et tireurs de pierre ont exploité jusqu’à une époque récente des carrières encore visibles dans les vallées du Coran, du Pidou, et en divers endroits de la commune. Plusieurs tailleurs de pierre, quant à eux, s’occupaient à transformer les pierres extraites.
Jusqu’à novembre 2016 des carrières, dans la vallée du Coran, aux Sablons et aux Roches, ont servi de champignonnières.
Époque contemporaine
Pendant la période révolutionnaire, entre 1789 et 1792, la commune a été rebaptisée Silvain-la-Roche. C’est le cas de beaucoup de communes durant cette période.
Pour plus de renseignements vous pouvez retrouver le nom révolutionnaire des communes de Charente-Maritime grâce au lien suivant
https://www.cgsaintonge.fr/donnees-historiques-et-geographiques/noms-revolutionnaires-des-communes-de-charente-maritime
La Révolution a vu se multiplier dans toute la France des bandes de « chauffeurs », des bandes armées très organisées de malfaiteurs et criminels qui pillaient et terrorisaient villages et fermes isolées. Les « chauffeurs » avaient pour habitude de chauffer les pieds de leurs victimes pour leur faire avouer où était caché leur magot. Des bandes de « chauffeurs » ont sévi dans la région. En 1796, le logis de Lorgère, sur la route menant à Cognac, a subi une attaque d’une bande de « chauffeurs », selon les écrits de l’Abbé Cousin4.
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Jusqu’au XIXème siècle, le village est réputé pour ses vignes. Suite à la crise du phylloxera fin XIXème, l’agriculture se diversifie : vergers, élevage de moutons, vaches laitières et laine. On y venait de loin pour ses foires. La place la plus grande du village en contre bas de l’éperon rocheux a d’ailleurs longtemps porté le nom de « champ-de-foire ». Foires et marchés y étaient installés, ainsi que sous les halles sur la Place Publique (aujourd’hui la Place du Marché), démolies en 1963.
L’importance vitale des «Fonts*» : fontaines et lavoirs
Jusqu’à l’arrivée de l’adduction de l’eau potable au milieu des années 1950, fontaines, lavoirs, et sources, situés dans les vallées, étaient d’une importance vitale pour les habitants de Saint-Sauvant.
Les lavoirs et sources étaient de véritables lieux de vie et de rencontre.
On peut imaginer que la Font Bigot, unique fontaine lavoir couverte de la commune et située en cœur de bourg à côté du ruisseau le Pidou, était un lieu animé tout au long de l’année.
Pour nombre d’habitants du haut du bourg, l’accès à l’eau potable était toutefois une corvée pénible, n’ayant pas de puits à disposition.
En 1789 et 1796, des arrêtés ont été pris, interdisant les activités polluantes comme laver les choux et les herbes dans les fontaines, laver la tripaille dans l’oeil des fontaines, et abreuver vaches et autres bestiaux. En 1802, un autre arrêté interdisait le rouissage du chanvre dans les ruisseaux, sources, mares d’eau propre à la consommation des hommes et du bétail.
L’accès à l’eau potable, essentiel, a aussi fait l’objet de plaintes et discordes… En 1852, un arrêté préfectoral interdisait au sieur Méchain d’agrandir son lavoir qui existait « de temps immémoriaux », suite à la plainte des sieurs Mouillot, Bourbon et Boutillier qui craignaient que l’agrandissement du lavoir « n’entrave le cours des eaux du Coran et ne nuise à l’usine (moulin) qui leur appartient sur le ruisseau ». Toujours en 1852, suite à une plainte des habitants du Perchaud des Chails, le sieur Pellier a dû démolir une partie d’un mur qui empiétait sur le chemin qui menait du hameau au puits du Perchaud.
Vu leur importance, les fontaines et lavoirs de la commune étaient entretenus régulièrement. Plusieurs délibérations du conseil municipal en témoignent. Par exemple, suite à une demande urgente de réparation de la Fontaine La Grange et la Font Bigot en septembre 1849, le maire avait autorisé, pour réparer les fonts, de « faire prendre les matériaux sortis de dessous le pont situé sur le ruisseau Le Coran, consistant en un ancien pavé, attendu que ces matériaux étaient devenus en pure perte ».
La source de la Font Chevessac a servi de station de pompage principale pour le réseau d’eau potable. Dans les années 1990, plusieurs débordements du Coran ont inondé la station, rendant à chaque fois l’eau impropre à la consommation pendant plusieurs jours; aujourd’hui, ce forage n’est plus utilisé, mais est toujours propriété du Syndicat des Eaux et le lavoir associé a disparu.
D’autres sources et fontaines sont maintenant nichées dans des propriétés privées dans le bourg et les hameaux et ne sont plus accessibles, comme la Font La Grange, en contre-bas de la Route Nationale 141, et qui fut entretenue par la commune pendant de longues années.
* Font : du latin Fons, Fontis : source, fontaine, eau de source
Sources :
1 Carte voies romaines : Eric Gaba, Flappiefh — Travail personnel from a topographic map from Eric Gaba, and from data provided by www.omnesviae.org
2 Bulletin de la Société des Archives Historiques de la Saintonge et de l’Aunis 1889
3Journal : Surface qu’un laboureur peut cultiver dans une journée. En Saintonge, on a coutume de dire : 3 journaux à l’hectare ou 1 journal = 33 ares (source : Société d’Histoire et d’Archéologie de Saintonge Maritime)
4 Histoire de Cognac, Jarnac, Segonzac et d’un grand nombre de localités entre Saintes et Châteauneuf, Archiac et Rouillac, Pons et Saint-Jean d’Angély, dans leurs rapports avec l’histoire générale de France depuis les temps celtiques jusqu’à l’an 1882 par l’Abbé Cousin, curé de Merpins, membre des sociétés historique et archéologique de l’Aunis et la Saintonge, enfant du pays. 1882. BnF Gallica.
Archives départementales et communales, dont des dossiers créés avec l’expertise du Pays de Saintonge Romane (V. Bergonzoni).